GAREF PARIS

GAREF PARIS

Ballon-sonde Télidat

lâcher réussi le 14 septembre 1986

C'est en 1982, à la suite du lancement de l'expérience satellisable Thésée, que le Garef s'est mis à la recherche d'un nouveau projet. Il choisit de réaliser un ballon-sonde qui, comparé à une fusée sonde, permet d'emporter une masse importante à des altitudes stratosphériques. Il ne restait plus qu'à trouver une expérience originale à embarquer dans la nacelle du ballon.

Plusieurs rencontres avec des personnes du Centre national d'études spatiales (Cnes) orientent alors le Garef vers une expérience de télédétection. Jusqu'à la fin 1982, le projet est présenté aux différentes personnes de la Division ballon du Cnes. Au vu du projet, M. Vincent, responsable des programmes du centre de lancement d'Aire-sur-l'Adour, propose au club un ballon permettant d'emporter une nacelle d'une centaine de kilos à une altitude d'environ 35 kilomètres. Il informe l'équipe des différentes possibilités de lancement et des contraintes relatives aux ballons. Il ne restait plus qu'à choisir le type de télédétection.

Le choix se porte alors sur la prise d'images du sol dans le domaine visible (cartographie) et dans le domaine du proche infrarouge (étude de la couverture végétale) obtenue par un capteur à transfert de charges à base de silicium (capteur CCD). Le Garef décide alors de donner un nom à l'expérience : Télidat (télédetection informatisée à détecteur à transfert de charges).

Dès 1983, le projet est scindé en différents domaines : électronique, informatique et mécanique. Des études démarrent dans ces domaines pour aboutir aux premières réalisations comme une maquette au dixième de la mécanique de la nacelle et la première version du calculateur de bord.

Vers mi-1983, la nacelle voit le jour avec l'aide des ateliers du Centre national d'études des télécommunications (Cnet). À la même époque, un prototype de la caméra permet d'obtenir les premières images. L'expérience se concrétise alors.

L'année 1984 est consacrée à affiner tous les sous-ensembles et à résoudre certains problèmes techniques. De nombreuses modifications ont été apportées au prototype de la caméra pour aboutir à une version proche de la version définitive. Par ailleurs, le système de transmission des images et des mesures a été développé.

Début 1985, une première version du logiciel de bord et d'acquisition des données au sol fonctionne. En février, une rencontre est organisée avec des personnes du Cnes afin d'aider et de conseiller l'équipe sur des problèmes de télédétection. Le Garef se rend également au centre de lancement de ballon stratosphérique des Landes, pour organiser une campagne d'intégration.

Ainsi, en juillet, pour la première fois, l'expérience Télidat est amenée au centre d'Aire-sur-l'Adour. Des essais de compatibilité électrique et mécanique avec les équipements du Cnes sont effectués. Ces essais sont un succès, et le lancement est programmé pour septembre. Mais quelques problèmes dans le mécanisme de la caméra surgissent, et le lancement est reporté en 1986.

C'est en juillet 1986 que l'équipe retourne à Aire-sur-l'Adour après avoir résolu les derniers problèmes techniques pour l'intégration de l'expérience en configuration de vol. Ces essais étant concluants, la date de lancement est confirmée pour septembre.


Campagne de lâcher

En France, les ballons stratosphériques sont lâchés suivant le sens des vents à partir de deux centres du Cnes : Aire-sur-l'Adour dans les Landes et Gap-Tallard dans le département des Hautes-Alpes.
Le centre de Gap-Tallard est utilisé durant les mois de mai, juin et juillet : à cette époque de l'année, les vents en haute altitude et sous cette latitude prennent une orientation ouest.
Au mois de septembre, les vents vont d'est en ouest, et le lâcher a eu lieu depuis Aire-sur-l'Adour.

L'équipe du Garef s'est installée dans le centre d'Aire-sur-l'Adour avec la nacelle et les équipements. Les derniers tests ayant été effectués, il a fallu attendre des conditions météorologiques favorables au lâcher de Télidat.

L'expérience par elle-même requiert un ciel sans nuage et le lâcher du ballon, un faible vent au sol. Après une semaine d'attente, les conditions étaient enfin réunies le dimanche 14 septembre 1986.

C'est avec ces conditions favorables que l'expérience a décollé pour effectuer son vol au-dessus de la région. Les premières images étaient reçues quelques minutes plus tard. La ballon a plafonné à une altitude de 26 kilomètres. Pendant les 3 heures et 30 minutes de vol, 25 images ont été prises. La nacelle est redescendue sous parachutes et a été récupérée intacte par l'équipe du Cnes.

Chronologie du lâcher

  • 5 h 30 : arrivée au centre de lancement, tests de l'expérience, essais de transmission et de télécommande
  • 6 h 00 : réunion météo, mise en place des équipes Cnes, préparation de la nacelle pour le vol
  • 7 h 10 : arrivée de l'expérience sur l'aire de lancement, tests de l'expérience
  • 7 h 45 : OK pour le dépliage du ballon, tests de transmission et de télécommande
  • 8 h 05 : OK pour le gonflage du ballon, tests de transmission et de télécommande
  • 8 h 34 : lâcher de Télidat
  • 10 h 36 : arrivée de Télidat au plafond
  • 12 h 06 : décollage de l'avion de repérage
  • 12 h 18 : séparation ballon-nacelle
  • 12 h 55 : départ de l'équipe de récupération
  • 14 h 35 : retour de Télidat au centre de lancement


Dépouillement

Une des parties les plus intéressantes de l'expérience consiste à exploiter les données fournies par Télidat au cours de son vol.

Les images issues de la caméra demandent un traitement, car elles ne sont pas directement exploitables.

Ainsi, plusieurs programmes informatiques sont développés sur le calculateur PDP11 du Garef, ainsi que sur le DPS 8 du Cnet.

Pour permettre l'exploitation des images, un premier traitement de celles-ci est nécessaire. On améliore le contraste et la netteté.

Ensuite, on affecte de fausses couleurs pour faire ressortir certains détails relatifs à la végétation.

Le développement de ces programmes va continuer afin d'aboutir à la détection automatique de la nature de la végétation au sol.


Description technique

L'intérêt d'une telle expérience réside principalement dans les nouveaux procédés employés. En effet, la télédétection se fait généralement à partir d'un avion et à l'aide de clichés sur pellicule photographique. L'approche du Garef a été totalement différente, puisque l'expérience est embarquée sur ballon stratosphérique et qu'elle emploi des techniques récentes en électronique et informatique.

L'innovation dans la méthode de prise de vue a été obtenue grâce à la réalisation d'une caméra conçue autour d'un capteur CCD (charge coupled device, que l'on peut traduire par système à transfert de charges). Ce composant à base de silicium est très compact et ne nécessite pas de tensions élevées, à l'opposé d'un tube image classique. La sensibilité de ce capteur s'étend du visible au proche infrarouge. Il a donc été prévu de prendre des images dans ces deux spectres.

Tout le traitement est entièrement numérique, c'est-à-dire que le signal issu de la caméra est digitalisé, stocké dans une mémoire temporaire, puis retransmis au sol. La réception est réalisée par un calculateur qui enregistre les résultats sur disque dur et affiche en temps réel les images sur un écran couleur. Par la suite, ces images subissent un traitement informatique pour faire apparaître les informations désirées. Elles sont par exemple traitées en fausses couleurs afin de faire ressortir tel paysage en telle couleur et tel autre paysage en telle autre couleur.


Équipements de bord

  • Calculateur de bord : basé sur un microprocesseur 8 bits 6809 ; mémoire interne de 4K RAM et 4K ROM
  • Entrées/sorties : 80 lignes d'entrées/sorties parallèles, 32 voies analogiques, 1 voie de transmission PCM (MIC) de 40 K bits/s
  • Mémoire d'image : mémoire dynamique de 192 K octets, vitesse d'écriture de 1 Mo/s
  • Alimentations : +5 V, +18 V, -15 V générés à partir d'une batterie 24 V - 10 Ah, autonomie de 10 heures

Équipement caméra

  • Objectif 50 mm ouverture 0.95
  • Capteur d'image CCD matrice de 380 x 480 pixels
  • Spectre visible et proche infrarouge
  • Asservissement du diaphragme en fonction de l'éclairement
  • Numérisation du signal vidéo 8 bits 1 MHz

Caractéristiques de la nacelle et du ballon

  • Masse de la nacelle : 168 kg
  • Dimensions de la nacelle : structure 1 m x 1 m x 1,2 m, réalisée en cornière d'aluminium
  • Isolation thermique de la nacelle : 6 cm de polystyrène
  • Stabilisation : 1 axe sur le nord magnétique
  • Volume du ballon : 110 000 m3
  • Longueur totale de la chaîne de vol : 300 mètres
  • Masse totale de la charge utile : 404 kg

GAREF PARIS : expérience concluante pour le lâcher de TELIDAT 1 (Journal de la Ville de Paris / novembre 1986)

Après une semaine d'attente pour réunir des conditions météorologiques favorables, Télidat a pu effectuer son vol plafonnant à 26 km d'altitude